En lisière de forêt
J’étais monté là avec des amis,
Pour être tous ensemble séparés.
Moment privilégiée de solitude.
J’aime ses instants de grâces intimes
Quand la nature cherche en nous l’écho,
Son alter-ego, autre façon d’être.
J’aime ce nid doux de l’instant présent,
Les parfums d’humus nés des pluies d’automne,
Les couleurs chaudes des arbres caduques
Envahissant les verts des persistants
Avant la grande grisaille hivernale.
J’aime tous ses cris rocailleux d’oiseaux,
Des geais et des pies, les toc-toc des pics,
Tambourineurs fous et infatigables.
J’aime ce vent dispersant les nuées
Décapant, à l’éponge, le paysage,
Faisant craquer les bois morts,
Se déchirant sans faiblir sur les troncs,
Levant en nuages de papillons
Les feuilles des arbres soi-disant mortes.
J’aime cette mer tout en vagues vertes…
D’où jaillira bientôt, grognante, puante,
Entre sa douleur et son ardeur,
Suivie d’une meute lointaine,
Essoufflée et isolée,
Riche d’un vain,espoir
Lourde d’une peur
Qui l’affaiblit :
Une bête !
Pan, touchée
Re-pan, tuée !
Yé hé hé
J’ai régné
Sur ta vie,
Ta douleur
Et ta mort
Car mes anges
Jusqu’à Moi
T’ont guidée.
Je suis Dieu !
Et ta hure
Traînera,
Héroïque
Belle mort,
Entre celle
Du dix corps
L’an passé
Rapporté
Et celui
Rapporté
L’an prochain.
J’étais homme
Et toi bête
J’étais faible
En mon corps
Et toi forte
En ta vie.
Tu mérites
Mon Éden.

D’un seul coup
J’ai tué
À cette heure
Et la bête…
Et mon âme !
Car moi… ici, qu’ai-je trahi, qu’ai-je trompé ?
Maintenant je comprends ; mais comment oublier ?
Ton chemin et ta vie emportés par l’ogive
De ma sinistre et sombre relique sacrée
Ointe d’huile minérale, pour ne point s’enrayer
Au moment fatidique, au sommet de ma … « joie »,
En achevant ta course, début de ton néant,
Viennent de rejoindre les miens dans le silence.
Tout ce vallon dès lors résonne de l’écho
De ton cœur qui s’est tu et des pleurs de mon âme.
…
On ne te mangera, pas plus qu’on festoiera.
Je vais creuser la terre laborieusement
De mes mains scélérates, et de mon cœur abject,
Et près de ta dépouille, je coucherai ensemble
Mon fusil et ma honte, mes fantasmes humains
Prétentieux, vaniteux, pervers et sauvages,
Et un petit bout de mon âme, pour te veiller
Et aussi implorer un pardon de ta part.
Gloire à toi qui n’a ni su ce qu’on te voulait
Ni compris ce qu’était ta vie dans la forêt.
Je vais laisser là mon bel uniforme orange
(Je ris sous cape en passant à Guantánamo,
Pardonne-moi de garder mon humanité…).
Avant qu’arrive le premier de mes comparses,
Nous serons loin de ce monde indécent, passé.
Leurs chiens galeux trouveront sans doute nos restes,
Et ils me prendront pour un fou. Si ils savaient…
Vois, mon ami, et entrons dans un monde libre.
La chasse est un problème de société… et non plus de nourriture. Nos sociétés, sales, polluantes et surtout déséquilibrées dans leurs rapports à la nature créent elles-mêmes les nuisances et s’imaginent les combattre sans avoir envie que les combats cessent… Pour la chasse cela relève d’une sorte de pseudo culture, une histoire de tradition au moins en apparence… Dans le fond, c’est autre chose… La chasse est une culture de la mort, de l’envie de tuer, de la rencontre avec le néant qui s’ouvre, de la puissance personnelle qu’on s’autorise comme si on était en manque de guerre. Le sang qui coule doit nourrir certaines âmes qui se défendent de se repaître de cette vue du sang mais qui la cultivent en elles et autour elles.
L’activité est passéiste et les impératifs contemporains qui voudraient que la cynégétiques ait un rôle écologique à jouer doivent être revus sous la forme « la cynégétique se donne un rôle à jouer » en nommant ses artisans comme exterminateurs de nuisibles. La législation (?!!!) réunit ces nuisibles ou plutôt Ses nuisibles en 3 groupes (?…) :
- Le 1er groupe : le chien viverrin, le raton laveur, le vison d’Amérique, le ragondin, le rat musqué et la bernache du Canada.
- Le 2ème groupe : la belette, la fouine, la martre, le putois, le renard, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, le geai des chênes et l’étourneau sansonnet.
- Le 3ème groupe : le lapin de garenne, le pigeon ramier et le sanglier.
(source : http://www.landes.gouv.fr/regulation-des-especes-susceptibles-d-occasionner-a42.html)
Selon les régions bien évidemment le tableau de chasse peut être différent. Je ne parle que des déclarés « nuisibles » car ils le sont effectivement par rapport aux activités humaines qu’ils mettent en danger et les déséquilibres induits par… ces activités. La plupart relève d’activités légitimes dans le cadre de l’évolution humaine, et cette évolution n’est pas en accord avec la nature, ou pas suffisamment…
Le sanglier adore la vigne par exemple, quelle aubaine après la mauvaise saison dans certaines régions… Quelle aubaine que cette liane qui n’en finit pas de pousser ses longues tiges à feuilles… Mais le sanglier, par lui-même, n’est pas nuisible. Et de toutes façons il possède ses prédateurs : l’ours, le chacal, le loup, le lynx, la panthère et le renard, selon la zone géographique dans laquelle il vit (source : idem illustration). Et chez nous, ces espèces sont indésirables pour cause…. d’élevage par des propriétaires souvent chasseurs… je pense !
Le sanglier apprécie la tranquillité forestière et le goût des glands, rien de nuisible là-dedans… Sans la vigne et autres délices que nous concentrons sans prendre les précautions nécessaires, le sanglier ne pullulerait pas… la production/consommation de glands suffirait à moduler les populations… On m’a dit qu’un chercheur, allemand je crois, avait établi un rapport entre la variabilité de production de fruits chez le chêne et les modulations de populations comme les sangliers (je n’ai pas trouvé de quoi valider ce dire, mais ce serait logique).
Sur près d’un million de spécimens recensés sur notre territoire (France), près de la moitié est tuée chaque année. En Europe, le nombre de sangliers a plus que quadruplé au cours des vingt dernières années.
(source : idem illustration)
[Je ne parlerai pas des sanglichons et autres cogliers… qui furent (et sont peut-être encore…) une catastrophe, probablement responsable aussi de l’emballement des populations [avis personnel sans doute vérifiable], avant que la législation (encore elle) n’y mette sa hure. Le débat sur la chasse n’est pas près d’être clos, et comme c’est un site de poésie ici… je me tais !]
Un avis sur « En lisière de forêt »